En 1965, Gabin quitte sa Normandie d'adoption pour venir à Argenteuil et sur la Côte d'Azur afin d'y tourner
Le Jardinier d'Argenteuil, film de Jean-Paul Le Chanois, sur des dialogues d'Alphonse Boudard et une musique de Serge Gainsbourg. Il y joue le rôle du père Tulipe, homme facétieux qui vit dans une curieuse retraite - un wagon immobilisé au milieu d'un terrain à Argenteuil - et qui cultive tranquillement son jardin tout en fabriquant de la fausse monnaie.
Pour son quatre-vingtième film l'acteur s'est collé une moustache et une barbichette et incarne un peintre naïf et figuratif qui passe son temps à confectionner des «croûtes» et désherber des massifs. Après maintes aventures dans les casinos de la Côte, il gagne de vrais billets de banque et retourne dans son cher Argenteuil, au moment de la construction de la ZUP du Val d'Argent, non sans avoir précédemment noyé sa planche à billets dans la Méditerranée.
Lors de ces plusieurs jours de tournage, il évoque avec son ami André Brunelin, devenu son attaché de presse, comment ils se sont rencontrés là, en 1952, lorsque le second fit un tribut au premier dans le cadre de son Ciné-club. Une soirée hommage qui allait devenir le point de départ d'une longue amitié, et lors de laquelle le comédien évoqua ses souvenirs d'enfance à Argenteuil :
« Quand j'étais gandin, je venais guincher au Soleil d'Or ... Ça existe toujours ? [...] Je me rappelle… on y montait à travers les vignes et les champs d'asperges... On y buvait du cidre et on y mangeait la galette, c'était bath ... Ça existe encore ? [...] On y dansait des javas de première... Les musiciens étaient perchés dans une loggia au-dessus de la piste. Un vrai repaire de Peaux-Rouges !
Le samedi soir, les ouvriers venaient y gambiller aussi et ça se terminait par des rixes... Le patron avait fini par fixer au plancher les tables et les chaises, mais il n'a jamais trouvé de solution pour les bouteilles et les verres... Dans les bagarres, ça valsait... Des fois, j'allais aussi au Moulin de la Galette [NDLR : le moulin de Sannois] sur les collines, c'était plus tranquille... »