Depuis plus de vingt ans, le réalisateur et critique cinéma, Philippe Collin, souhaitait adapter le roman de Tristan Bernard,
Aux Abois. Si l'action du livre se passe dans les années 1930, le cinéaste a fait le choix de transposer son long métrage dans les années 50 :
« Le seul impératif, c'était que le film se situe à un moment où la peine de mort existe. Ce qui laissait une certaine marge : entre Charlemagne et François Mitterrand ! Le style des années 30 est plus marqué que le style des années 50. Il est aussi plus éloigné de nous. En restant dans les années 30, je me serais senti pris au piège du travail de reconstitution. »
L'un des charmes de ce film réside justement dans cette reconstitution fidèle des années 50, tant au niveau des costumes, des véhicules d'époque, qu'à celui des objets de tous les jours. Le téléphone a un rôle très important dans
Aux abois et les décorateurs ont d'ailleurs fait appel à l'agence France Telecom de Soisy-sous-Montmorency pour agrémenter les divers lieux, chambres d'hôtels, bureaux, ou maisons particulières, d'anciens appareils authentiques.
En composant un assureur aux pulsions meurtrières, Elie Semoun — habitué, d'ordinaire, au registre comique — renoue ici avec le drame. Un genre qu'il avait expérimenté en 1999 avec
Stringer (Klaus Biedermann).
« C'est un contre-emploi », poursuit Philippe Colin. « J'aime beaucoup les gens qui peuvent, comme ça, faire rire 600 personnes d'un coup tous les soirs. C'est ce magnétisme qui m'intéressait, mais il s'agissait d'en faire autre chose. »
Pour son rôle, Elle Semoun, qui réside depuis plusieurs années à Enghien, s'est un peu inspiré du jeu d'acteur de Daniel Auteuil.
« Souvent, il incarne des personnages comme ça, complètement opaques comme dans L'Adversaire », explique-t-il. « Et puis j'ai beaucoup pensé à L'Étranger d'Albert Camus. Comme Meursault, Paul est un type qui trouve un sens à sa vie en se tuant. Mais il est quand même un peu plus sympathique que le héros de Camus ! »
L'équipe du film était à la recherche d'un site qui puisse représenter la prison dans laquelle est enfermé Duméry lorsqu'il est arrêté, et c'est tout naturellement vers le fort de Cormeilles-en-Parisis qu'elle s'est orientée. Vieux murs de pierre, petites fenêtres croisées de barreaux, longs couloirs sombres et défraîchis : tout concorde à faire de cet endroit une geôle retirée du temps et du monde.